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FONTAINE-AU-BOIS

 

 

 

 

 

PETITE CHRONIQUE DE L’OCCUPATION EN 14-18

On a beau dire, comme l’adage bien connu, que « avant l’heure, c’est pas l’heure », nous avions nous-mêmes, dans notre dernier numéro, commencé d’évoquer la première guerre mondiale dans cette rubrique. Mais aux alentours du 11 novembre 2013, ce fut un véritable déferlement dans les médias : émissions et documentaires télévisuels, livres, débats, articles, conférences se sont multipliés sur le thème de « 14-18 », plusieurs mois avant le centenaire de ce conflit mondial qui a tant meurtri notre peuple et notre histoire.

Sans doute notre intercommunalité aura-t-elle, aussi, l’occasion dans les prochains mois de s’associer à cette commémoration. Mais dans l’immédiat, c’est une nouvelle fois dans les archives de Fontaine-au-Bois que nous avons trouvé un rappel synthétique des événements que la mémoire se doit de ne pas oublier.

Le 1er août 1914, vers 4h30, arrivaient deux messagers annonçant la mobilisation générale en France. C’était un samedi. Stupeur générale ! Monsieur le maire fait aussitôt sonner le tocsin. Le lundi 3 août, déclaration de la guerre, l’état de siège est proclamé. Toutes les usines sont arrêtées. On mobilise en toute hâte. Il faut un laisser-passer pour franchir le pont de chemin de fer, d’un village à l’autre. Les pauvres soldats n’ont pour tout équipement qu’un képi, une blouse blanche de corvée et un fusil à baïonnette.

Les Anglais, venus au secours de la Belgique et de la France, arrivent à Fontaine vers le 15, se dirigeant vers Bavay et Dour. Les batailles de Dinant et Dour ne peuvent arrêter le flot des envahisseurs allemands et l’on voit passer quelques débris de l’armée française, quelques pauvres soldats pédalant à toute vitesse sur la route du Cateau, comme des oiseaux qui fuient à l’approche de l’orage. Les gens de Fontaine, pris de panique sur la foi des journaux qui avaient présenté les Allemands comme des barbares, pillant, violant, tuant, s’apprêtent à partir pour trouver un refuge. Quelques-uns sont obligés d’aller toujours de l’avant ne pouvant plus revenir en arrière ou franchir des zones de combat ; d’autres s’arrêtent dans le Bois l’Evêque et s’y cachent…

Malheureusement, toutes les maisons abandonnées dans le village sont livrées à un pillage en règle. Beaucoup d’habitants se voient enlever linge, couvertures et surtout le vin, qui était l’objet des convoitises des soldats. Mais à part quelques escarmouches d’avant-postes et quelques fusillades, la commune ne subit aucun dégât majeur : même le presbytère eut la bonne fortune de ne recevoir aucun « Boche » lors des quatre jours que dura l’invasion, où les troupes en marche s’y succédèrent sans interruption.

Le mois de septembre fut assez calme, un certain nombre d’habitants venant chaque jour à l’église prier pour la France ; mais cet élan se ralentit assez vite… Puis on vit des troupes revenant de Vichy et se dirigeant vers Ypres stationner dans le village, où elles trouvèrent à se loger. De même, lors des mois qui allaient suivre, ce fut un incessant va et vient de soldats, tantôt de passage tantôt de repos. Vers le milieu de 1915, arriva la colonne 20 dont tous les hommes étaient employés au transport du bois. Elle fut remplacée par la colonne 33, qui allait quitter Fontaine seulement quelques jours avant l’armistice, après avoir occupé le pays pendant trois ans.

Cette colonne étant composée en majorité de protestants, « nous (1) nous eûmes à souffrir de certaines vexations de la part du capitaine, surtout lors des perquisitions opérées à l’église et au presbytère, en novembre 1917 : encore une fois, couvertures, linge, vin, cidre, furent raflés ; et même une amende de 550 marks nous fut signifiée pour des objets et cuivres que nous avions cachés. »

En janvier 1917, Fontaine vit arriver des évacués d’Artois et de Picardie, qui furent logés chez l’habitant et, à la fin du mois, ceux qui le désiraient purent prendre un train spécial pour retrouver parents ou amis, au-delà de la ligne de front. Ils furent une quinzaine et eussent été davantage s’ils avaient pu emporter titres et argent. Et si les hommes de 16 à 60 ans avaient été autorisés à partir...

Mais ils furent réquisitionnés pour aller travailler à la coupe du bois de tranchée.

  1. Ce « nous » s’explique du fait que la rédaction de ces épisodes a été extraite du registre historique de la paroisse… catholique.

 

Recueilli par Jean-Marie Leblanc