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CHERS DECHETS

Le 5 mars 1956, le maire de Bousies annonce, lors d’un conseil municipal, la mort du cheval de la commune. Il rappelle qu’il avait été acheté en mars 1955. L’acquisition d’un nouveau cheval s’avérant indispensable, il demande au conseil de délibérer sur cette nouvelle acquisition et désigne 4 conseillers municipaux, cultivateurs de profession, qui se mettront en rapport avec les vendeurs éventuels.

Pourquoi est-ce important ? A l’époque, vous savez que cet animal était un outil de travail, mais il était également collecteur des ordures ménagères. En effet, cette tâche était à la charge de la commune.

Retraçons une partie de cette compétence à travers les différentes délibérations et compte-rendu des conseils Bodiciens.

Le 29 novembre 1959, lors de la séance du conseil municipal, le maire annonce encore la mort du cheval. Il rappelle qu’il sert de conducteur de corbillard, de concessionnaire du ramassage des boues, du transport des ordures du cimetière, des ordures ménagères et des décapements des chemins vicinaux.

La question se pose alors de sous-traiter l’ensemble de ces tâches. Les contacts avec les personnes susceptibles d’assurer ces vacations ne donnent aucun résultat.

Le conseil municipal, jugeant que le rachat d’un cheval qui serait le quatrième depuis 1949 (les 3 précédents sont morts de coliques provenant suivant le rapport du vétérinaire du manque de travail journalier), décide l’achat d’un tracteur agricole au gasoil. Les avantages retenus sont une économie de temps, l’entretien moindre et la sécurité renforcée. Afin de financer cet investissement, la commune aura recours à un emprunt local par voie de souscripteur public.

Le 14 février 1960, le maire revient devant le conseil municipal afin de pouvoir solliciter le préfet du Nord pour une demande de subvention pour l’achat de ce même tracteur avec remorque.

Le 8 juin 1971, devant l’accroissement considérable de la masse d’ordures à collecter chaque semaine, le maire estime que deux jours de ramassage seront sous peu insuffisants. Le matériel acheté il y a plus de dix ans ne correspond plus au besoin du service, il n’assure plus la collecte avec toute la propreté et l’hygiène désirables. L’achat d’un camion benne pour environ 90 000 F (de l’époque) ne résoudra pas le problème. En effet la commune ne possède qu’un terrain de décharge situé à Solesmes, hameau d’Ovillers, au fond d’une pâture seulement accessible par un tracteur agricole.

Afin d’assurer un service rationnel, la concession serait souhaitable et la commune rejoindrait en cela la plupart des villes et villages de la région qui ont confié l’exploitation de leur service à une société privée. Ainsi, considérant que le prix de revient de la collecte effectuée dans les conditions actuelles, tout en donnant peu de satisfaction, revient sensiblement au même prix que la concession à une entreprise privée, le conseil municipal concède l’enlèvement des ordures ménagères à la SERTIRU à partir du 1er octobre 1971.

Cependant, pour pouvoir assurer le financement de cette nouvelle dépense, il sera créé une taxe d’enlèvement qui sera perçue en 1972. Cette dernière sera calculée en fonction du revenu cadastral bâti de chaque habitation.

Le 20 octobre 1971, lors de la séance suivante, le conseil, après consultation de l’administration des finances et renseignements complémentaires, décide de ne pas instituer cette taxe. Il semble en effet qu’elle soit très difficile à appliquer puisqu’elle ne concerne que les propriétaires.

Le 25 janvier 1973, SERTIRU propose à la commune la signature d’un avenant, nécessaire par suite de l’évolution des charges sociales.

Le 10 décembre 1974, la taxe d’enlèvement des ordures ménagères s’invite à nouveau au conseil municipal. Le coût de la collecte hebdomadaire qui s’élevait à 2 375 F par mois en janvier est actuellement de 3 030 F. En 1975, une augmentation très sensible risque de se produire puisque la société concessionnaire répercutera sur ses clients les frais d’entretien de son terrain de décharge. Le prix de la collecte passera alors à 4 100 F par mois. C’est pourquoi l’instauration de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères sur les propriétés bâties revient à l’ordre du jour. Le conseil considère, à nouveau, que l’instauration de cette dernière risque de créer de nombreuses difficultés pratiques. Les personnes âgées, actuellement dégrevées à cause de leurs bas revenus, se verraient de nouveau imposées. C’est pourquoi le financement sera pour 1975 inclus dans le produit des impôts locaux. A cette époque, cinq cents tonnes de déchets sont déjà ramassés par an dans notre village !

Le 3 février 1976, devant les nouvelles dispositions imposées par Monsieur le Ministre chargé de la protection de la nature et de l’environnement sur l’aménagement et l’exploitation des décharges contrôlées, la SERTITU demande d’inclure dans la redevance mensuelle une incidence des frais de décharge s’élevant à 1 004 F, ce qui amènerait cette redevance à 4 542 F HT. Cette charge devenant de plus en plus lourde pour la commune, le conseil municipal, après audition du texte de la convention, émet un avis défavorable à cet avenant et demande de revoir cette question.

Le 5 mai 1976, forcé par la loi, le conseil doit accepter l’avenant n°3 passé entre le concessionnaire et la commune pour l’augmentation du tarif.

Le 3 juin 1977, le conseil décide de remettre à chaque foyer un sac plastique en raison de la grève du personnel de SERTIRU. En effet la grève dure depuis le 18 mai pour des revendications salariales et sur les conditions de travail très pénibles. L’union locale des Syndicats CGT de le Cateau et des environs demande aux conseillers municipaux de soutenir leur action et de leur apporter une aide financière. Il leur sera attribué la somme de 900 F.

En 1993, la gestion de la collecte des ordures ménagères est devenue une compétence obligatoire de la Communauté de « Communes du pays de Mormal et de Maroilles ».

Nous constatons aisément l’importance du dossier des ordures ménagères. Elles sont de plus en plus imposantes et le coût de leur traitement de plus en plus lourd à supporter.

Le « Grenelle de l’Environnement » ajoute encore des règles coûteuses. Nous ne pouvons pas contester l’objet principal de ces nouvelles décisions. En effet, il s’agit de changer notre comportement face aux déchets pour en réduire le volume et ainsi penser à l’avenir de la planète et à nos futures générations.

Pouvons-nous encore réellement faire confiance à un tel dispositif ? La question doit être posée. Le travail de réduction des déchets serait plus porteur sur les fabricants. Qui impose aux consommateurs les contenants ? Le consommateur est encore une victime qui est montrée du doigt. Qui nous impose à prendre des décisions dirigées, voire obligatoire ? Rappelez-vous le vote du 5 mai 1976.

La compétence des ordures ménagères est maintenant déléguée à notre communauté de communes qui s’agrandira dès le 1er janvier 2014.

Nous devrons décider alors d’un mode de financement commun. La redevance ou la taxe incitative. Il est fortement aisé de comprendre que seule la redevance est incitative. En effet, elle concernera tout le monde. Rien ne nous empêche d’y ajouter des dégrèvements partiels. Alors ne nous trompons pas dans nos décisions, même si elles sont lourdes à porter en organisation. La taxe est plus simple mais tellement non incitative. Un administré non payeur ne changera pas de comportement, il est utopique de croire le contraire !

Thierry Jacquinet