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Il y a près d’un siècle et demi, la « tuerie » du Favril…

Notre époque n’est pas la plus avide de faits divers sordides et morbides ou d’autres affaires scandaleuses qui défrayent quotidiennement la chronique populaire à grand renfort de médias et de magazines « people » des plus affligeants ! Pour preuve que cette mode est fort ancienne, bien même antérieure à celle de l’époque où nous allons nous placer dans quelques instants, c’est qu’elle faisait déjà les choux gras des gazettes et autres pamphlets de l’Ancien Régime et a toujours trouvé son lectorat, friand d’hémoglobine, d’affaires de dépravations, de scandales financiers ou autres ragots de cour où se ourdissaient les plus infâmes intrigues du pouvoir. Ainsi pourrait-on résumer la nature humaine à ce qu’elle a de plus voyeuriste dans l’immédiateté des événements, d’intemporel dans ses turpitudes, sauf à ce que ceux-ci puissent se révéler par la suite à portée historique dans ce qu’ils impriment l’histoire d’un moment, d’un lieu, d’une mémoire collective : ainsi en est-il de « l’affaire Manesse », « du drame des plus épouvantables dans les annales judiciaires » de « l’affreuse tragédie » qui désigne au travers de ces quelques qualifications de la presse d’alors ce que l’on pourrait simplement appeler un crime, un assassinat en nombre, survenu en ce vendredi 17 mars 1865 à Le Favril et dont peu aujourd’hui ont gardé la mémoire, et pourtant…

En effet, cet épisode tragique pour la communauté villageoise d’alors a été relayé dans tous les organes de presse écrite locaux (« L’Observateur » d’Avesnes-sur-Helpe, le « Journal du Cateau », le « Journal de St-Quentin », le « Mémorial de Lille ») ou nationaux (« Le petit journal », « La Presse », « L’Illustration ») durant les six mois de 1865 qui se sont écoulés entre la survenue de l’affaire et l’exécution du coupable. Nous allons retracer cette chronique judiciaire au travers des différentes sources journalistiques, judiciaires et administratives qu’il a été possible de recouper pour détailler l’affaire jusqu’à son épilogue et qui a marqué la population du canton et même au-delà.

Les faits, le lieu et les victimes de la tragédie : le vendredi 17 mars 1865 donc, vers 19h00, alors qu’il ne fait pas encore nuit, la famille Largillière attend le retour du père pour passer à table. La maison qualifiée « d’assemblage de bâtiments un peu bizarre », en fait une ferme en équerre, avec habitation en front à rue et bâtiments d’élevage (écurie, étable et grange en retour vers l’arrière), avec « un terrain cultivable, des prairies » qui s’étendent derrière la maison et « une haie vive qui sépare, par le couloir qu’elle forme, cette habitation de la maison voisine », située face à la Place, en vis-à-vis d’une auberge, de la « maison d’école » et de la « maison commune » (mairie) est le cadre du massacre qui va la décimer… sauf la mère. D’abord le père, Isidore, âgé de 48 ans, herbager honnête, prospère et courageux, rentrant juste des champs, sauvagement assailli dans l’écurie où il rentre ses chevaux fraîchement dételés et comptant au total 10 coups à la tête (il ne décèdera qu’à 21h00 !), puis son fils Martial, âgé de 17 ans, venu s’enquérir de son retard, qui aura le crâne fracassé et mourra sur le champ aux côtés de son père agonisant, puis la sœur Bibiane, âgée de 19 ans, envoyée par sa mère inquiète, qui comptera un terrible coup à l’épaule et huit plaies à la tête, tentera de s’échapper et sera retrouvée morte quasi instantanément dehors, à environ 12 mètres de la porte d’entrée, au bord du chemin, par un passant qui donnera l’alerte. Mais entre temps, l’agresseur aura terminé son carnage en agressant dans la cuisine l’épouse, Zélie, âgée de 38 ans, de deux coups au front, deux autres au visage et un au menton qui vaudra à l’infortunée de survivre après deux jours de coma, mais qui n’aura pas su voir son agresseur ; puis sa sœur, Désirée Largillière, 42 ans, résidant dans l’habitation attenante avec sa fille naturelle Léopoldine, 16 ans, accourues aux cris et bruits suspects, n’auront pas la même chance : la première succombera le lendemain à 5h00 du matin des cinq coups reçus à la tête et la seconde vers 21h00 le soir-même, de deux coups à la tête également, après avoir été retrouvées enchevêtrées dans le couloir de l’habitation de leur frère et oncle, à un mètre du seuil d’entrée.

Aussitôt l’alerte donnée, le tocsin sonne, la gendarmerie commence de battre la campagne à la recherche de suspects, tandis que des médecins de Landrecies et d’Avesnes viennent en secours aux malheureuses victimes dont seule la mère Zélie survivra…

 

Premiers éléments d’investigations et principal suspect : très vite les premiers relevés d’investigations amènent des certitudes : le vol crapuleux n’était pas le mobile de l’agresseur car de l’argent fut retrouvé dans l’habitation ; par contre, l’auteur du carnage devait connaître les habitudes de la famille pour agir ainsi à une heure propice à pouvoir sévir séparément, tout en s’assurant de pouvoir éliminer individuellement toute une famille qui ne pouvait que le reconnaître si son crime n’était pas total, d’où l’acharnement bestial déployé. Très vite, une fois la piste de vagabonds ou de bandits de grand chemin écartée après des battues en forêt de Mormal et dans les environs entre Le Cateau et Avesnes, des soupçons se portent vers les deux beaux-frères, seuls héritiers putatifs d’une petite prospérité âprement et dignement gagnée : le premier, Arnould Presse, époux d’une sœur Largillière, Célestine, sera vite innocenté car en famille ce soir-là ; mais l’autre, Joseph Manesse, époux d’Elisa Largillière, nettement moins apprécié dans le village, n’attire pas les sympathies. Sous le surnom du « grand Dumoulin », il est réputé « triste individu », « singulier bonhomme », « coureur de cotillons, débauché, violent, buveur, se servant de sa force physique pour inspirer la terreur ». Ses affaires sont mal en point : sa ferme, rue du Bois, en fait appelée « la Cense bleue » avant qu’elle ne soit rasée dans les années 1990 pour cause d’abandon et de délabrement, sorte de fermette avesnoise en pierre bleue, isolée au milieu des pâtures, est hypothéquée. Le soir du drame, un témoin, bien que ne l’ayant pas formellement identifié car il se cachait sous ses vêtements l’avait croisé se dirigeant par les pâtures vers chez Largillière ; mais Manesse s’était forgé un alibi, tandis que sa femme et ses enfants (une fille et un garçon) étaient invités chez des voisins. En effet, il avait été singulièrement remarqué au cabaret du Carcan – qualifié de « nom si tristement singulier » par le tribunal de Douai plus tard, quand on sait qu’il s’agissait de l’instrument et du lieu de supplice du même nom pour les condamnés de droit commun exposés à la vindicte et à la raillerie populaires – lequel était tenu par le couple Evrard (par ailleurs garde-champêtre de la commune), à l’orée du bois du Toillon, tout en haut de la rue du Bois et à l’opposé du village. Il y était arrivé vers 20h00, et resté environ 2 heures à rire, boire et même chanter, voire à payer des coups de manière inhabituelle, jusqu’à ce que sa femme vienne l’y chercher en lui apprenant le drame survenu au village dans leur famille. Interrogé par la maréchaussée, comme d’autres, ce soir-là en mairie, beaucoup remarquèrent de la boue aux genoux de son pantalon, mais aussi qu’il portait curieusement une chemise propre et fraîche. Dès le jour revenu, la poursuite de l’enquête conclut que l’agresseur n’était pas arrivé chez les Largillière par la place du village, ce qui était trop risqué, mais bien par l’arrière, discrètement par le sentier longeant l’écurie, et probablement en franchissant plus avant la Riviérette où des traces de pas et glissades avaient été repérées sur les berges… droit en provenance de chez Manesse via les pâtures ! L’arme, quant à elle, fut retrouvée dans le poulailler, ou plus exactement le seul fer de hache, démanché, qui expliquait aussi la violence et la portée mortelle des coups assénés.

Emmené dès le 30 mars en prison à Avesnes pour interrogatoire comme principal suspect, Manesse avait auparavant assisté au Favril aux obsèques de ses victimes le lundi 20 mars, dépeintes comme tristes et empreintes d’un grand recueillement par une assemblée nombreuse, venue d’autres villages voisins, mais dont certains membres n’avaient pas manqué de remarquer l’allure étrange de ce parent de plus en plus désigné comme suspect.

Les aveux successifs de Manesse et le mobile du crime : descendus expressément au Favril de la cour impériale de Douai, le procureur général Pinart et le conseiller Duhem, juge-instructeur de cour d’assises, ré-interrogent Manesse dès le 5 juin. Le 8 juin, une confrontation capitale avec sa seule victime survivante, la veuve Zélie Largillière, qui le rappelle à une comparution certaine et intraitable, seul devant Dieu, tôt ou tard, termine de faire avouer au suspect son crime. Le journal « La Presse » prétendrait que par ailleurs Manesse se serait également livré à des confidences à un des 2 gendarmes chargés de sa surveillance. Quoi qu’il en soit, la ligne de défense ainsi que le mobile avancés par Manesse révèlent une tentative désespérée et maladroite d’entraîner avec lui d’autres comparses de manière éhontée et presque puérile. Reconnaissant donc les faits dont il était soupçonné, Manesse avoua la préméditation notamment par le repérage précis des lieux et des habitudes de ses futures victimes (ce que certains témoins en audience ultérieurement attesteront de manière plus ou moins précise faute d’identifier formellement Manesse) dans les 2 jours qui précédèrent le drame. Puis il ira dans un premier temps jusqu’à impliquer son beau-frère Arnould Presse dans la préméditation, avant de se rétracter devant l’incongruité du propos, avant de soutenir ensuite que cette affaire était liée à un adultère intenable avec la veuve Largillière, qui aurait abouti à cet épouvantable et inattendu dénouement. Finalement, il avouera qu’il s’était bien exécuté seul, ayant même poussé la perfidie jusqu’à inviter sciemment au cabaret Isidore Largillière en fin d’après-midi, afin de le retarder dans ses travaux et de le forcer à ne rentrer que vers 19h00, le temps de repasser chez lui emmener sa femme et ses enfants chez des voisins où ils étaient invités, de s’emparer de sa hache, de franchir dans les 7 minutes suffisantes, via les pâtures et la rivière, la distance qui le séparait de l’écurie de Largillière pour commencer son carnage.

Quant au mobile de son forfait, Manesse avoua dans un premier temps qu’il remontait à la liquidation et au partage des biens de la belle-mère Désirée Leveau, à son décès, … en 1834, soit 31 ans plus tôt, au prétexte qu’Isidore avait été avantagé de 2 chevaux. Notons que Manesse n’avait épousé l’aînée des filles Largillière, Elisa, qu’en 1849, soit 15 ans après ladite succession ! Devant une telle futilité, peu entendable, Manesse avoua plus clairement son vrai mobile : contre près de 14 000 francs de passif hypothécaire, l’héritage que lui procurerait la maison et les biens fonciers de la famille d’Isidore Largillière en cas de disparition complète serait de 29 000 francs et surtout, Manesse avait des vues sur l’habitation qu’il se voyait bien transformer en cabaret. Telle était donc la motivation d’un aussi « effroyable crime de la cupidité » comme le dira la presse de l’époque…

Le procès, la défense et la sentence : commencée le 5 août par l’acte d’accusation impitoyable à l’égard de Manesse, lu par le procureur général Pinart, l’audience criminelle se poursuivra à la cour d’assises du tribunal de Douai en faisant comparaître pas moins de 35 témoins, dans une salle comble. La défense de Manesse sera difficile et malaisée, assurée par l’avocat du barreau de Douai commis d’office, Edmond Lemaire. Ce dernier tentera dans sa plaidoirie d’invoquer « une exaltation d’ivresse et puis ensuite un accès de folie furieuse » pour expliquer le geste disproportionné de Manesse qui l’a pris le 17 mars 1865, par rapport au grief d’une spoliation de sa part d’héritage équitable au décès de sa belle-mère. Manesse n’ajoute rien tandis que la parole lui revient en dernier ressort, probablement dépassé par la spirale infernale qui s’empare de lui et face à laquelle il ne comprend peut-être pas toute la démesure de ses actes, perpétrés sous l’empire de l’alcool. Son avocat aura bien essayé de clore par un appel à la pitié pour lui épargner la vie, tentant de convaincre de l’inutilité de l’intimidation du crime par la mort « car Dieu seul en est maître ! » et que la justice des hommes ne peut se substituer à celle de Dieu… en vain. De telles envolées, dignes d’un Badinter des temps modernes qui parviendra quant à lui à abolir la peine de mort par les mêmes démonstrations 116 ans plus tard, n’auront pas convaincu l’opinion et le jury de l’époque, encore immature pour entendre de tels raisonnements.

Le président de la Cour nuancera toutefois le portrait dur dressé par le procureur Pinart : il ne retiendra pas une sordide préméditation en vue d’un héritage provoqué par la disparition très aléatoire et risquée de toute une famille mais plutôt, et à juste titre, « un coup de trop qui a poussé ses rancunes à un paroxysme fatal » et il mettra en exergue aussi ses aveux, sans lesquels la vérité n’aurait pu être pleinement établie et tout au mieux des présomptions fortes.

Le jury se retira de 17h45 à 18h25 pour délibérer et rendra son verdict, somme toute dépassionné, sans retenir la préméditation, mais reconnaissant la culpabilité de Manesse et le condamnant à mort. La cour indique la place publique de Landrecies comme lieu d’exécution… Manesse n’exprime aucune émotion, aucune réaction !

Le 24 août, la chambre criminelle de la Cour de cassation à Paris rejeta le pourvoi engagé contre l’arrêt de la cour d’assises du Nord à Douai, puis la demande en grâce impériale fut refusée tout autant…

L’exécution publique et l’inhumation de Manesse à Landrecies : la place publique de Landrecies, cité de garnison encore emmurée dans ses fortifications, se révélant trop insuffisante pour accueillir en toute sérénité une foule probablement nombreuse curieuse de ce genre de spectacle, il fut décidé de procéder à l’exécution publique sur l’esplanade de la ville basse, autrement dit devant la caserne Clarke. L’instrument en vigueur depuis la Révolution pour ce type d’œuvre de justice qu’était la guillotine, fut installé à l’extrémité occidentale de l’esplanade, face à la ville, c’est-à-dire devant la partie actuelle de l’ancienne caserne qui tient lieu de siège à notre intercommunalité. La date fixée pour l’application de la sentence de mort fut le samedi 9 septembre 1865, à 6h00 du matin. Prévenu la veille à minuit, Manesse ne montra aucun signe d’agitation. Préparé à son dernier voyage vers sa contrée, il fut extirpé de sa cellule de la prison de Douai pour embarquer dans le train à 1h30 sous escorte de la gendaremerie, descendre en gare de Valenciennes à 2h30, puis poursuivre en voiture de louage sous escorte et revêtu d’une camisole. Le convoi escorté arriva à 5h00 du matin à Landrecies au poste de garde de la porte d’entrée de la ville basse.

 
La ville grouillait d’une foule très nombreuse, accourue depuis la veille de tous les cantons, voire arrondissements voisins, qui fit relater dans la presse que les hébergements en ville étaient saturés et que la nuit fut bruyante à Landrecies ce soir-là, car beaucoup n’ont pu dormir dans une telle agitation générée par un afflux incessant de badauds. De 10 à 12000 personnes, voire de 15 à 18000, selon les sources, si l’on tient compte des curieux qui ne purent pénétrer dans l’enceinte fortifiée et furent confinés à l’extérieur des portes de la ville, la foule habituelle attendue pour une telle démonstration de la justice populaire avait mobilisé toutes les brigades de gendarmerie à cheval de l’arrondissement et une compagnie d’infanterie venue de Cambrai pour renforcer la garnison de la ville afin d’assurer le maintien de l’ordre. Des spectateurs se hissèrent même sur les toits de la ville basse, tandis que la foule au sol, impatiente et compacte, était régulièrement repoussée autour de l’échafaud par les troupes à cheval. Elisa Largillière, femme de Manesse, était elle-même présente dans l’assistance, fraîchement arrivée de Douai dans la nuit où la veille encore elle rendait visite à son mari en ignorant, comme lui, qu’il s’agissait alors de leur dernière entrevue… 

Monsieur de Douai, accompagné de son fils, ainsi que Monsieur d’Amiens - comprenez par cette appellation les exécuteurs des basses œuvres en province, c’est-à-dire les bourreaux - arrivés dans la nuit, via la gare du Cateau, pour remplir leur office prirent possession de Manesse au pied de l’instrument du supplice vers 5h50, transporté qu’il fut en charrette depuis les 30 mètres qui le séparaient du corps de garde où sa dernière toilette fut accomplie. Il monta sans assistance les marches de l’échafaud, embrassa une dernière fois le prêtre et son bourreau, qui le saisissant et le poussant sur la planche basculante de l’instrument, fit actionner la chute de la lame fatale et fit taire à jamais Manesse qui pourtant haranguait encore la foule d’un « adieu tertous ; adieu min garchon Joseph ; on va me couper la tête… ». Le silence était complet, il était 6h00 du matin, la justice des hommes venait de faire expier son crime odieux à Manesse…

Aussitôt, la dépouille du supplicié fut prise en charge et transportée au cimetière de Landrecies où elle fut ensevelie promptement et temporairement avant de rejoindre la terre du cimetière du Favril pour lequel la famille devait présenter une demande expresse d’autorisation de transfert auprès du sous-préfet, par respect pour les sépultures de ses victimes qu’il y avait précipitées près de 6 mois plus tôt ! Personne ne sait si cette demande fut formulée, obtenue et mise en œuvre par la famille : les archives communales et le cimetière du Favril ont perdu toute trace des concessions antérieures à 1866, époque où les inhumations se faisaient encore majoritairement en pleine terre sans autre monument qu’une croix funéraire et subirent une ré-affectation au fil du temps, les faisant disparaître à jamais de la mémoire des hommes…

Le même jour, dès 7h00 du matin, le registre d’Etat civil de Landrecies enregistrait la déclaration faite par 2 employés de l’octroi (municipal), missionnés pour ce faire, avec cette simple mention du décès de Manesse « sur l’esplanade de la ville basse de Landrecies », sans aucune précision quant aux circonstances inhabituelles de sa mort!

De nombreux curieux, après l’inhumation au cimetière de Landrecies, au Faubourg de France, poursuivirent le chemin jusqu’au Favril à 3 kilomètres, pour visiter les lieux du crime !

La veuve Manesse, Elisa, ne lui survécut que de 5 ans au Favril où elle décéda le 12 octobre 1870 et fut inhumée. Curiosité ou hasard des faits, le fils Manesse, Joseph, en fait du prénom d’Erice, alors âgé de 15 ans en 1865, que son père rappelait dans ses recommandations du dernier instant, mourut 4 jours après sa mère, à 20 ans, célibataire sans descendance. Quant à la fille, Joséphine, enfant naturelle d’Elisa, née en 1838, soit 11 ans avant le mariage de ses parents et déclarée Largillière par son grand-père, ne se maria qu’à 41 ans en 1869 au Favril sous le nom de Manesse, comme fille légitime de notre Joseph Manesse, avec Thomas Gantois, également du Favril, de 10 ans son aîné ; mais leur union ne dura même pas 2 ans puisqu’il décéda lui aussi dans les semaines qui suivirent le décès de sa belle-mère et de son beau-frère, le 1er novembre 1870, sans descendance. Il n’est pas établi à ce jour ce qu’elle a pu devenir par la suite : s’est-elle remariée ? a-t-elle quitté le village ? y est-elle décédée elle aussi sans postérité ? … à croire que le châtiment divin s’acharnait à poursuivre la famille de notre meurtrier, lequel avait déjà répondu de ses actes devant la justice de l’homme !

Frédéric DAMIEN

Cet article, que j’assume pleinement sur le plan de l’analyse historique, ne doit pas être perçu comme portant un jugement de valeur quant aux protagonistes de cette chronique judiciaire, lesquels appartenaient à de vastes et honnêtes familles, aux multiples branches collatérales et dont certains descendants peuvent encore exister, ni faisant preuve d’un appétit douteux pour l’exhumation de « vieilles affaires » que chacun souhaiterait enfouir. Qu’ils ne voient ici qu’un juste rappel de faits avérés, faisant œuvre de reconstitution d’une histoire de nos jours méconnue mais qui a marqué largement notre territoire et ses habitants, et qu’il me paraissait, à ce titre, intéressant d’évoquer.