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La longue histoire de l’église Saint-Rémy (1)

Notre territoire, maintes fois soumis dans le passé aux guerres et aux invasions, et par conséquent aux destructions, recèle néanmoins quelques richesses architecturales et patrimoniales. Les édifices religieux, soit qu’ils aient été plus ou moins épargnés, soit qu’ils aient été rebâtis, en font partie. Ainsi nos églises en Avesnois.

Laissées à la charge des communes, elles font l’objet aujourd’hui, au fil du temps, d’efforts d’entretien ou de restauration qui sont à l’honneur des municipalités ou des associations qui s’en soucient. Entre autres exemples, Le Favril, Bousies, Preux-au-Bois, Maroilles ont montré la voie, en 2C2M.

Fontaine-au-Bois, à son tour, a entrepris la rénovation intérieure de son église Saint-Rémy et les travaux de peinture qui viennent de lui redonner un peu de pimpant nous fournit l’occasion de rappeler son histoire, cette église constituant avec le lavoir municipal (déjà restauré) et le kiosque à musique (tout récemment construit) l’élément majeur de notre patrimoine. Le registre historique de la paroisse, par bonheur exhumé des archives, constitue un véritable trésor d’informations qui nous permettent d’en reconstituer le passé.

Avant sa grande reconstruction, entamée en 1749, on trouve la mention de l’existence d’une église au 11ème siècle (années 1046-1048) sans plus de précision. Si son architecture a évolué, son emplacement semble être resté le même, au centre du village, le long de la route reliant Landrecies à Bousies ; elle était alors entourée d’un cimetière fortifié quadrangulaire, doté de tourelles d’angle. Ses dimensions étaient modestes, en rapport avec le nombre de fidèles qui s’y rendaient. La lourde tour de façade et la nef en constituaient le corps, et la couverture était alors en tuiles, par mesure d’économie : les archives nous apprennent que le fournisseur de « tieulles » venaient de Landrecies et d’Englefontaine,  de même que le pavage en carreaux rouges, datant de 1674. Les deux chapelles, dédiées à Notre Dame et à Saint-Rémy, étaient alors existantes. On trouve également mention de dons privés pour l’achat d’un ostensoir, la remontrance et la réparation dorée d’un calice et l’acquisition de douze chandeliers en cuivre auprès d’un chaudronnier de Mons. Les fonts baptismaux ont été installés en 1682 et la sacristie date de 1701.

Le 18 mars 1749, donc, l’architecte Delille établit un devis de reconstruction et d’agrandissement, devis complet en quinze articles qui nous renseigne sur les méthodes et les matériaux utilisés. En voici quelques exemples :

Article 1 : La démolition de l’église sera faite à corvée par les habitants du village (1) ;

Article 2 : Le mortier pour la maçonnerie sera composé d’un tiers de chaux vive bien éteinte dans un bassin, mêlée avec deux tiers de bon sable, le plus pur qui se pourra trouver dans les environs ;

Article 3 : La maçonnerie pour les fondations sera faite de bonne pierre, observant de mettre dans le fond pour premier lit les plus grosses pierres posées sur leur plat pour servir de litage ;

Article 5 : La maçonnerie que l’on fera au début du soubassement sera de briques ainsi que celle des murs d’arcade de la nef. Les briques que l’on emploiera seront bien cuites. L’entrepreneur choisira les plus dures et les mieux moulées pour les employer aux parements aux faces extérieures ;

Article 9 : Le bois pour les charpentes sera de chêne coupé en bonne saison, sans aubier, pourriture ni mauvais nœuds défectueux, coupé à bonne arête ;

Article 11 : La couverture sera faite d’ardoises de la meilleure qualité  qui se trouve aux carrières de Fumay et seront bien appareillées et taillées d’équerre, posées sur un lattis de feuillets de chêne bien sec ;

Article 15 : Il sera fait deux portes de menuiserie à deux battants chacune pour entrer dans la nef. Elles seront faites de bonnes planches de bois de chêne bien sèches, de deux pouces d’épaisseur proprement rabotées.

Ce « cahier des charges » de reconstruction fut réalisé par Jean Ternand, mayeur et maréchal, désigné comme entrepreneur. Il reçut pour ce travail mille écus, monnaie du Hainaut, et l’église s’engagea  à payer de 1749 à 1782 (plus de 30 ans !) à Ternand et à ses héritiers les avances qu’il avait consenties.

« A l’inscription des comptes, nous constatons que cet engagement a été scrupuleusement tenu », indique le registre, qui précise encore que « les briques employées ont été tirées du jardin donné par Jean Demain aux pauvres » ; et enfin que « l’église fut terminée à une date inconnue avant d’être bénite par Monsieur de Doyen » après que différents travaux eurent complété l’achèvement :

En 1762, le tanneur reçoit 18 livres et demie ;

En 1765, M. Navez, menuisier au Quesnoy touche 124 livres pour ouvrages faits à l’église ;

En 1769, Nicolas Pierrart, du Cateau livre 38 mames de chaux pour 11 livres et 8 sols ;

En 1770, Antoine Gille touche 12 livres pour clous et ouvrages en fer ;

En 1781, l’église est blanchie par Louis Crotin, maître maçon à Landrecies pour 13 livres et 4 sols.

Enfin, «  en 1904, Mademoiselle Marie Lefebvre, de Lille, parente et héritière de Madame Renée Hautcoeur, se fait un plaisir, sur la demande du curé, d’offrir en son nom et au nom de ses trois sœurs carmélites, un nouveau pavement à l’église de Fontaine-au-Bois, composé de dalles de 30 X 30 noires, de la maison A. Piche d’Halluin (Nord). La matière et les différentes opérations ont coûté 1766 livres et 95 centimes. Le travail, qui a duré un mois, est terminé pour le jour de la Toussaint 1904 »

Dix ans plus tard éclatait la Première Guerre Mondiale dont les dégâts allaient provoquer  une nouvelle restauration et de nouveaux travaux que nous évoquerons dans un prochain numéro.

(à suivre)

(1) Le mot « démolition » indique bien qu’il s’est agi d’une reconstruction quasi complète

Jean-Marie Leblanc