a   a

La haie : source de vie, protégeons la !

 

Avec le retour du printemps, notre région de bocage reprend vie et notamment avec « les haies ».

Rarement un seul mot, le mot « HAIE » aura désigné des réalités aussi différentes. Il laisse entendre, en effet, un éventail de diversités. Il y a des haies « brise vent », alignement de peupliers qui en poussant tout en hauteur laissent d'importants espaces à leurs pieds. Il y a des « haies bocagères » généralement perchées sur un talus dominant un fossé, les « haies de berge » avec leurs aulnes et leurs saules souvent têtards qui longent nos petits cours d'eau et aussi les « haies fleuries » qui enclosent les jardins, les « haies défensives » toutes en épines et piquants...

Mais c'est aussi cette diversité qui les réunit.

En effet la principale vertu des haies, c'est qu’elles introduisent de la variété, de la discontinuité dans un paysage pour le plus grand profit de la vie. Une haie, au fond, c'est un bout de forêt, certes petit et étroitement contrôlé, dans un milieu ouvert.

C'est d'ailleurs ainsi qu'elles sont nées, au Moyen Age. Lorsque les paysans défrichaient les bois, ils laissaient autour de la parcelle quelques arbres et buissons permettant de délimiter leur terrain. D’autant que le droit coutumier autorisait n'importe qui à « mener pacager les bestiaux dans les lieux non cultivés et qui ne soient pas clos ». Et dans une époque sans fil de fer, clos signifiait entouré d'une haie. La parcelle ainsi défrichée, si on l'exploitait bien, permettait à son propriétaire de continuer à se fournir en bois de chauffage, tout en cultivant ou en élevant des bêtes (des porcs, essentiellement nourris avec des glands de la forêt).

Les haies, au pluriel, car ces îlots de forêts qui atteignirent,  dans notre pays, leur apogée au XIXème siècle avant de régresser inexorablement, recèlent une biodiversité d'une richesse insoupçonnée.

La haie bocagère, quant à elle, a culminé à la fin du XIXème siècle, c'est à dire au zénith de la déforestation, avec deux millions de kilomètres linéaires en France. Depuis, sous les coups de la rationalisation de l'agriculture et de l'exode rural, elle recule. Il n'en restait, en 2000, que le tiers de cette distance. Or, on sait depuis plus d'une vingtaine d'années que les haies sont utiles à bien des égards. Biologiquement, elles apportent au milieu une très grande richesse, diversifiant et multipliant les plantes et les animaux présents. Une diversité qui réduit les pullulations de nuisibles, rongeurs ou insectes. Et, sur le plan écologique, elles freinent l'érosion des sols et atténuent les crues, tout en maintenant un taux d'humidité favorable.

Mais ces connaissances nouvelles, si elles ont freiné la tendance, ne l'ont pas encore tout à fait inversée. Malgré les aides de l'état, les quelques deux mille cinq cents kilomètres de haies plantées chaque année suffisent tout juste à compenser celles qui sont arrachées.

Et les arbres isolés continuent à régresser.

En ce qui concerne l'histoire, les haies nous apportent aussi des renseignements précieux et notamment sur notre village de Preux au Bois, où l'on découvre à chaque début de printemps des pieds de houblon qui s'y épanouissent et y fleurissent. Ces pieds de houblon sont la preuve de l'activité des habitants ; en effet au XIXème siècle, le village compte au moins trois brasseries dont celle d’ Emmanuel Désiré Marouzé qui produisait 150 hl de bière par an et créée en 1768, puis la brasserie Vaille fondée en 1880 qui cessa ses activités en 1914 et enfin la brasserie Brabant fondée vers 1874 par M. Dupont qui, elle, cessa ses activités en tant que brasserie pure en 1933.

Ces haies sont aussi la preuve, par la présence de ces pieds de houblon, des habitudes de distraction des habitants. En effet « le dimanche, ils (les Preutains) allaient au café et jouaient aux cartes, au billon, aux quilles et à la cholette ». Preux au Bois ne comptait pas moins de 64 cafés dans les années 1900 et 1 seul à l'heure actuelle.

Les haies ne nous renseignent pas seulement que sur la gent humaine, mais aussi sur le monde animal.

En effet, les haies sont de très généreux producteurs de nourriture. On songe évidemment aux fruits et aux baies : mûres, prunelles, noisettes, cynorhodons, faines et aussi fruits de l'aubépine, du sureau, … Tout cela est consommé par les oiseaux et aussi par de nombreux petits mammifères. Mais les fleurs sont également précieuses pour les insectes butineurs, d'autant qu'elles apparaissent souvent au tout début du printemps lorsque les fleurs des champs ou les plantes cultivées ne dispensent pas encore ni pollen ni nectar. Et puis il y a évidemment les jeunes feuilles, les jeunes pousses, aliments de nombreux pucerons et chenilles, indispensables à la survie des insectivores.

La liste  des effets bienfaisants de la présence des haies autour de nous pourrait encore être bien longue mais cela fera peut-être l'objet d'un prochain article.

 

Catherine Marsy