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Les 16, 17 et 18 mai 1940
Triste odyssée pour les évacués français et belges en forêt de Mormal
 

La Belgique est envahie depuis le 10 mai et des Belges quittent leur pays pour la France avec, pour les plus nantis, des véhicules motorisés.

Par la suite ce sont des piétons qui émigrent avec des landaus, des brouettes, des vélos, des charrettes tirées par des chevaux. Vers Maubeuge, des Français se mêlent à la cohorte.

Après Maubeuge, l'autorité militaire les oriente vers la forêt de Mormal par Hargnies. Il faut laisser libres les grands axes.
Les évacués traversent la forêt par le Coucou, le Godelot, les Grandes Pâtures vers Preux-au-Bois par des routes forestières rectilignes et dangereuses.

Ces routes sont prises facilement sous le feu des avions allemands, les Stukas. Bilan : 18 morts.

 

Au carrefour de la Touraille, des réquisitionnés par la mairie délivrent des cartes d'identité comme ils peuvent.

Abandonnés, certains de ces évacués, en plus de l'exode, affrontent une longue agonie en forêt. Par exemple, une femme blessée appelle vainement à l'aide. Mais, terrorisés, les témoins de la scène ne se montrent pas. Seul le curé du village, l'abbé Démaret, apporte son réconfort aux blessés.

Après le bombardement, le curé peut constater l'incendie de trois maisons dans le village : la maison forestière de la Maîtrise, le presbytère et la maison Paul Delhaye.

On note également 12 décès chez les Belges.

Par une fatigue maintenant constante, les évacués, à l'aube, reprennent la route après avoir dormi à la belle étoile. Les enfants, mal réveillés, affamés, n'auront pas à manger.

Vers le Point d'Arrêt, des motocyclistes leur disent de rebrousser chemin alors qu'une bonne partie des gens est déjà passée vers la route forestière de Preux. Certains s'y font mitrailler.

Ils repartent donc vers le Godelot mais ils subissent une attaque aérienne qui fait à nouveau des morts. On se remet en route et par « chance », un véhicule allemand distribue de la soupe à base de pois aux ventres affamés.

Après le 20 mai, les évacués repartent vers la Belgique avec, au total, 47 morts sur le territoire de Locquignol : 30 Belges et 17 Français.

Pendant ce retour, un bébé enroulé dans un châle plein de sang est trouvé dans les bras de sa mère tuée. Par miracle, il est sauvé.

En forêt, par une forte chaleur, les corps des humains et des animaux, principalement des chevaux, pourrissent sur place et dégagent une odeur insupportable. Des ouvriers français, réquisitionnés par la mairie, vont chercher ces corps humains pour une sépulture plus digne dans les cimetières de Locquignol et de Preux-au-Bois. Les cadavres d'animaux sont enterrés en forêt.

Des enfants appellent leurs mères décédées à quelques mètres d'eux...

Ce fut l'exode français et belge en forêt de Mormal.

Marc Lavie